Le Vercors
- Canon 6D Mk II

- 20 sept.
- 11 min de lecture
Dernière mise à jour : 18 oct.
Point de départ de cette semaine dans le Vercors : Villard-de-lans, que l'on rejoint en passant par Grenoble. Une autre route, l'une des plus belles du pays, passe par les gorges de la Bourne à l'ouest pour rejoindre ces hauts plateaux. Elle déambule dans la vallée, sous les sapins, les cascades et les stalactites en hiver. C'est d'ailleurs cette route que j'avais pu emprunter lors de la première découverte de cette magnifique région, sous la neige. Villard est une moyenne station, pas très haute mais qui est pleine de charme lorsqu'elle est au rendez-vous et nous permet de skier à travers sapins et larges pistes. Au départ des glovettes, la localisation est idéale. C'est ici que nous passons les deux premières nuits avec un ami sur place qui a la chance d'y avoir un studio. Après une soirée dans le village à déguster les spécialités locales (ravioles du dauphiné, bleu d'Auvergne, fromages et charcuteries...) et une première balade à la cascade de la Fauge, l'objectif du jour est de monter au Col Vert. Cette randonnée d'une dizaine de kilomètres nous amène au nord des crêtes depuis les hauts plateaux, en passant par l'ouest.

Départ à l'aube. La météo annonce des orages à partir de 15h et on sait combien le temps change vite en montagne. Cela nous permet d'apprécier les couleurs du soleil qui se lève sur les cimes. Le chemin commence à travers la forêt, passe au travers de prairie, entre les ruches, avant de rejoindre un refuge à 1 km du sommet. De là-haut, la vue est imprenable sur le versant Est et la vallée d'Avignonet. Au loin à gauche, la Chartreuse, puis Belledonne et en face, même les sommets des Ecrins dépassent. Le Mont Blanc à gauche, lui, culmine. Le temps de faire quelques photos et d'observer aux jumelles à la recherche de la faune locale sans succès, nous repartons en retournant sur nos pas. L'alternative est de faire le chemin retour via le versant Est mais le vent s'intensifie et les nuages se chargent au loin, certains franchissant même les crêtes. On continue donc rapidement en longeant à la même altitude les balcons du nord du Vercors avant de redescendre vers Villard. Sage décision, car au moment même où nous arrivons à l'abri, les premiers éclairs éclatent et des trombes d'eau s'abattent sous un ciel noir. On est bien au chaud !


Après une boisson chaude, quelques sucreries et du repos, on profite du mauvais temps pour aller dégoter notre diner à la coopérative Vercors lait. De la tomme du Vercors persillée, quelques ravioles (il y en a pour tous les goûts) et du saucisson régional, le panier est tout trouvé. De retour dans notre petit refuge, nous sommes au premier rang du spectacle gratuit qui s'offre à nous : le ballet des nuages qui gagnent les montagnes jusqu'à ne plus les voir du tout..

La suite du voyage se fera depuis un camp de base différent : Gresse-en-Vercors. Ce village, à quelques kms seulement de Villard à vol d'oiseau, nécessite 1h30 de trajet puisqu'il se trouve de l'autre côté de l'enfilade de crêtes, plus au sud. En revanche, il est au départ des nombreuses randonnées qui parcourent ces montagnes et que l'on retrouve sur le très bien fait site du Trièves. Après un trajet entièrement dans le brouillard et avoir pris possession du petit airbnb face à la montagne, une éclaircie pointe le bout de son nez en fin d'après-midi. On saute sur l'occasion pour partir sur une première randonnée sans trop réfléchir, celle du Serpaton. Cette petite montagne fait face aux crêtes, mais ce n'est qu'une fois en haut des 400 m de dénivelés dans la forêt que l'on apprend qu'il est possible d'y aller en voiture également. Les vacances sont sportives ici !

Arrivés au sommet, nous profitons d'un quart d'heure de ciel dégagé avant que les nuages dansant ne reprennent complètement le dessus. Le temps de rencontrer un couple de retraités (on est en septembre) au look photogénique profitant de la vue et du soleil et les cimes en face dépassant encore légèrement des nuages. Une marmotte siffle et on la repère devant son terrier aux jumelles au loin. Un agriculteur donne à manger à ses chevaux, l'ambiance est très paisible et l'on décide d'aller voir sur quelques mètres encore au-dessus si l'on peut observer l'autre versant. Cela s'avère être un échec, les nuages sont plus rapides et arrivent là-haut avant nous pour cette fois ! Retour au camp de base par une boucle, et comme le temps s'y prête de nouveau, direction la raclette.
Hors saison, l'office de tourisme est fermé, et si nous avons d'habitude une bonne étoile de ce côté-là, les prévisions météo pour la semaine sont cette fois exécrables. En croisant différents sites, on espère quelques courtes éclaircies ponctuelles mais vite éclipsées par des nuages et de la pluie en continu. Nous ferons au jour le jour, en espérant pouvoir voir les sommets alentours. L'avantage est que nous n'avons pas besoin d'anticiper, nous sommes au plus près.
Le 2e jour, inutile de rester autour de Gresse, nous nous réveillons et nous coucherons dans le brouillard complet. Les 5°C au lever du soleil nous font oublier les 30°C vécus il y a seulement 2 jours, le changement est radical. Après de nouvelles recherches sur le site du Trieves, et sous les conseils de notre ami nous partons pour l'un des incontournables de la région : les passerelles himalayennes du lac d'Avignonet. Le site est un peu plus éloigné et le soleil doit y faire une apparition dans l'après-midi.

Le lac serpente dans une grande vallée, l'eau est turquoise et laiteuse et il n'y a personne. Un camion de snacks propose des frites, ça va nous réchauffer car le vent est glacial, mais il a le mérite de chasser les nuages. Un arbre dans l'eau nous rappelle le fameux lonely tree de Wanaka, en Nouvelle-Zélande. La balade fait normalement une boucle d'un dizaine de kilomètres. En se garant sur le parking ouest du lac, un bateau nous ramène sur l'autre rive et emprunte les deux passerelles suspendues au-dessus de l'eau, mais comme c'est la saison morte et que l'on a pas vraiment eu le temps de se renseigner, on ne sait pas si la navette passe, et la fenêtre d'éclaircie est courte. On se gare donc au parking des Vignes pour rejoindre à pieds la première passerelle himalayenne, celle de l'Ebron. Pour ne pas mentir, elle donne le vertige !

Les jours suivants, entre deux éclaircies, on alterne entre visite de laiterie, montée au Serpaton (en voiture !), jeux de société, cuisine savoyarde, courtes balades et cocooning. La route entre Gresse et Chichilianne est très jolie, en passant par les hauteurs donnant sur le village de La Bâtie surplombé par le Mont Aiguille. On a du temps pour se renseigner pour les randonnées qui se profilent enfin à l'horizon, car le temps parait peut-être plus clément sur la fin de semaine, au programme donc, trois sélections : les crêtes du Mont Brisou, le pas de la Balme et le boss ultime du Vercors : le Grand Veymont.

Le Mont Brisou

Pour cette randonnée, on part d'un pari car une nouvelle fois le réveil se fait en plein brouillard, on ne voit même pas la terrasse. Mais la météo indique du soleil le midi alors on tente en se disant que le temps de monter, on en profitera une fois là-haut. Cette petite montagne est celle que l'on voit - normalement - directement depuis notre balcon. De son sommet, la vue est imprenable sur le mont Aiguille d'un côté et les crêtes du Vercors de l'autre.
Après une erreur d'itinéraire et donc un aller-retour sur le premier chemin qui nous emmenait droit au Grand Veymont, on se retrouve sur la charpente des pistes de skis l'hiver, des pentes d'herbes bien raides mais obligatoires en l'absence des remontées mécaniques à l'arrêt en cette saison. Le reste de l'ascension se fait dans la forêt, de façon encore plus raide et ce jusqu'au sommet. On en oublie donc très vite les quelques 8°C tant qu'on ne s'arrête pas. Mais une fois au sommet, et comme l'on a 1h d'avance sur la fenêtre ensoleillée prévue, le ressenti redescend très vite. Un déjeuner, quelques photos, et le soleil commence à percer, tout doucement au début. Puis très vite, le nuage dans lequel on se trouvait se dissipe et tout se découvre enfin.

Quatre jours après notre arrivée, nous avons alors l'impression de découvrir complètement les lieux. D'abord ce rocher immense, face à nous. Des panneaux indiquent qu'il était considéré comme impossible à gravir, jusqu'en 1492. Aujourd'hui encore, on y accède qu'en l'escaladant et pas autrement. Vue d'ici, des tâches blanches parsèment le sommet et l'on disait au Moyen-Âge que c'étaient des draps étendus à sécher sur les prairies vertes là-haut par on ne sait qui la nuit (ce sont des rochers). Avec les jumelles, je découvre même qu'un bouquetin est là-haut ! Si seulement j'avais un téléobjectif..
De l'autre côté, l'enfilade de sommets qui composent les crêtes caractéristiques se découvrent aussi, plus timidement. Les cimes au loin resteront couvertes aujourd'hui mais le Grand Veymont face à nous se montre par intermittence, les nuages vont très vite. Il est 14h et après 1h sous le soleil, on touche déjà à la fin de notre fenêtre météo. Avec les jumelles je vois au loin quelques courageux à la moitié de l'ascension du plus grand sommet de la région. Au-dessus d'eux, trois chamois marchent dans les cailloux. Il faut maintenant redescendre, en faisant une boucle, car le mont Aiguille a déjà disparu. Sur le retour, nous avons même la surprise de rencontrer deux biches dans les bois qui s'étonnent de voir quelqu'un ici. Elles nous observent nous éloigner.

Le Pas de la Balme
Depuis les balcons qui longent l'enfilade de crêtes, plusieurs passages permettent d'accéder aux sommets. Au nord, le pas de la Balme est l'un d'entre-eux. Depuis le col de l'Arzelier, on rejoint d'abord un refuge au pied des Deux soeurs en passant par un fort dénivelé dans la forêt, toujours au coeur du brouillard. C'est en sortant de cette forêt, arrivés au belvédère du Pré Achard que l'on se retrouve comme au Paradis. Le paysage est totalement irréel. Nous sommes à découvert, en pleine mer de nuages d'où sortent pendant quelques instants des sommets ici et là au loin, avant de redisparaitre tout aussi vite.
On continue le long des balcons où en contrebas, la mère de nuages stagne, mais au-dessus de nous tout s’éclaircit. Quatre kilomètres nous séparent de l’intersection qui nous conduira ensuite au sommet de la Balme. Parfois plusieurs crêtes en enfilades sont découvertes et le spectacle est déjà magnifique. Tout à coup après un virage serré, je tombe nez-à-nez avec un groupe de chamois. Eux sont aussi surpris que moi de la rencontre. En m’entendant, ils courent vers les sommets et disparaissent à travers les arbres. Mais plus loin encore, j’entends des cailloux au-dessus de moi. Ni une ni deux, je prends les jumelles à l’affût du moindre bruit, et c’est là que j’aperçois deux bouquetins qui m’observent depuis un moment. A quelques mètres seulement, j’entends aussi deux marmottes qui se renvoient des sifflements. Certainement pour avertir de notre présence. Tous ces locaux ne doivent pas être habitués après la grosse saison de l’été car en effet et depuis le début du voyage, nous sommes toujours seuls sur les chemins. Lors de cette randonnée, nous n’aurons rencontré absolument personne de toute la journée. Certainement la raison pour laquelle nous croisons encore plus loin, et après une petite pause déjeuner, vue sur la vallée, un autre bouquetin à deux mètres de nous qui ne nous aura pas entendu arriver, lui non plus. Il nous accompagnera alors jusqu’au sommet escarpé du pas de la Balme, où il rejoindra tout un groupe de congénères qui mange paisiblement dans la prairie.

La fin de l’itinéraire slalome entre les rochers car le dénivelé est au maximum et donne le vertige : l'étroit passage entre la falaise et le col débouche finalement sur l’extrémité du versant ouest qui n’est que le haut du plateau sur lequel on se trouvait le week-end précédent. Ici nous sommes à quelques kilomètres à peine de Villard-de-Lans et de la randonnée que nous avons faite au Col vert. Nous pourrions même rejoindre l’appartement de notre ami si nous avions le temps. On profite alors ici de la vue, mais le vent ramène les nuages au travers du petit passage du col, donc nous ne nous attardons pas.
On oublie pas qu’une fois arrivés au sommet, seulement la moitié de la randonnée est faite, alors nous entamons la descente à travers la forêt, et c’est sous la pluie que nous rentrons au camp de base.
Le Grand Veymont
C’est finalement le tout dernier jour, sur le fil du rasoir que nous avons la chance d’avoir une météo favorable et nous en profitons donc pour faire l’incontournable, le sommet du Vercors : le grand Veymont. Pour cela, notre ami nous rejoint dans notre Airbnb et c’est après une bonne tartiflette et une courte nuit que nous nous levons à l’aube pour en profiter pleinement. Nous décidons de garer une voiture au départ de la randonnée et une autre à l’arrivée plus loin de l'autre côté, ce qui nous permettra de profiter également du sentier des balcons un peu plus longtemps.
Après 1 km sur le sentier que nous avions déjà emprunté lorsque nous nous étions trompés lors de l’Ascension du Mont Brisou, nous sortons de la forêt et des nuages en même temps. Le Grand Veymont est juste là, face à nous, imposant et surmonté d’un ciel bleu imprenable. C’est aussi la première fois que nous rencontrons d’autres randonneurs, et nous choisissons de faire la boucle en passant par la baraque du Veymont. Ici et là, nous rencontrons déjà des chamois, de grosses marmottes, déjà bien prêtes pour l’hiver et l’hibernation.

Nous arrivons finalement assez rapidement au pas de la Ville. D’ici, la vue est complètement dégagée sur le versant Ouest et le plateau qui s’étire devant nous à l’infini. En revanche, c’est une erreur de penser que nous sommes bientôt arrivés, car c’est ici que le plus dur commence. La suite du chemin est à la limite de l’escalade au milieu de rochers encore enneigés. Plus nous montons et plus l’enfilade de crêtes que nous découvrons s’aligne devant nous en contrebas. C’est le paysage que je voulais voir depuis le début et nous y sommes enfin après ces quelques mètres d’escalade. Ici, nous sommes de nouveau à l’extrémité des plateaux qui forment une prairie surélevée comme nous l’avions vue au pas de la Balme. Des randonneurs sont déjà en train de descendre. Nous pensons y être, mais le sommet se cache en réalité derrière d’autres plus petits sommets à chaque fois que nous prolongeons le chemin, et l’on n'en voit pas la fin. La fatigue se fait bien ressentir mais l’arrivée au sommet se dessine enfin devant nous.

Nous profitons de la vue et avons bien mérité notre pause repas en haut de cet hôtel 4 étoiles. Le mont Aiguille se dresse devant nous, mais les nuages sont déjà de retour. Nous distinguons quand même le massif des Ecrins en face, le mont Blanc au loin, la Chartreuse et Belledonne à gauche. Dommage, les crêtes sont déjà cachées de nouveau par les nuages. On se rend compte à quel point il peut être dangereux de randonner dans le brouillard en sachant le vide qui se dresse devant nous, sans pouvoir le voir.
Coup de chance, de l'autre côté une dizaine de bouquetins broute l’herbe et se laisse approcher. Moins de chance, je n’ai pas le bon objectif car si l’ultra grand angle est idéal pour les paysages, il éloigne les sujets. Ils ne sont heureusement pas farouches et je m’en donne à cœur joie sur les photos. Nous profiterons une heure de les avoir ici au plus proche de nous avant d'amorcer la descente dans le sens inverse jusqu’au pas de la Ville.


D’ici nous pourrions reprendre le chemin et remonter sur les crêtes de l’autre côté, mais les nuages commençant à se densifier, nous restons sur notre premier choix et optons pour les balcons par le versant Est. Sans aucun regret, car c'est alors un feu d’artifice de faune locale qui s’offrira à nous, jusqu’au bout. Chamois, bouquetins, marmottes par dizaines et dizaines, se retrouveront près de nous tout au long du sentier et se laisseront approcher. Enfin, avant la dernière descente à travers la forêt pour rejoindre la voiture, nous admirons pour la première et dernière fois l’enfilade de crêtes découvertes devant nous en un superbe panorama que nous n’oublierons pas.

































































































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